Monsieur le Président

Humeur

Frédéric O. Sillig




Monsieur le Président,

Vous faites publiquement l'apologie d'un assassinat. Une élimination sommaire qui aurait été perpétrée sans faire aucun cas de la souveraineté d'un pays étranger. Commanditée par vous-même, chef d'un État prétendument « de Droit », et démocratique de surcroît. La « cible », accusée d'une atrocité qu'elle n'aurait à l'évidence pu organiser sans la complicité de caciques qui gouvernent ceux-là mêmes qui sont désignés comme ses victimes, n'a su bénéficier du moindre procès, …même truqué. La localisation de son refuge et les éléments à charge de son fantomatique « acte d'accusation » nous sont présentés comme établis grâce à des actes de torture, selon vous, un mal nécessaire. Voilà une célébration de la barbarie au prétexte de la combattre; en fait, un sophisme atteint d'auto-cannibalisme intellectif.
Le corps de l'exécuté est bien entendu invisible puisque immergé dans une mer, selon les sources officielles ou enterré depuis près de dix ans selon d'autres. L'opposition manifeste du décor de cette mise en scène à la production continue du goutte-à-goutte des informations contradictoires ne contribue pas davantage à la créance.
Un supplément d'insulte, Monsieur le Président, à l'intelligence des lecteurs et aussi à celle des journalistes qui attendent, depuis des lustres –sans trop d'entrain– que la presse leur appartienne à nouveau.

Voilà à quoi, pour élever une cote, s'abaisse un personnage en qui étaient placés autant d'espoirs de millions de gens. Un personnage qu'ils croyaient considérer comme leur semblable. Le vôtre, Monsieur le Président.

S'il m'est donné de paraphraser le déserteur Vian, Monsieur le Président, ou alors la gourgandine Monroe, Mr President, c'est pour vous signifier, en dépit de tout, la ressemblance de vos actes à ceux de vos prédécesseurs.


Yours sincerely
FOS

PS : Et maintenant, les moutons retournent à la pâture.